AeroScope, l’outil de détection des drones DJI, n’est plus en production

La version mobile d’AeroScope avait été abandonnée en 2022 (voir ici). Désormais, la page AeroScope sur le site de DJI indique que l’autre version de ce produit, destinée à un usage fixe, « n’est plus en production ». 

C’est quoi, AeroScope ?

Tous les drones de DJI (depuis 2016) diffusent des informations sur le vol, en temps réel, comme la position, la hauteur, l’altitude, le cap, la vitesse, l’identifiant du drone ou encore la position de la radiocommande. La diffusion de ces informations est activée tout le temps, sans possibilité de la désactiver. Pour capter ces données, DJI propose (ou plutôt proposait) un outil appelé AeroScope, uniquement vendu aux entités gouvernementales. Pour en savoir plus, lisez cette interview d’un porte-parole de DJI en 2017.

Pourquoi c’est intéressant, AeroScope ?

Cet outil détecte la présence de drones de DJI. Il permet par exemple aux forces de l’ordre d’être averti d’un drone qui s’approcherait d’un aéroport, d’une centrale nucléaire, d’un rassemblement de personnes (manifestation, concert, événement sportif), d’une prison, d’une zone militaire, etc. La portée de la détection de la version mobile est sensiblement la même que celle d’un drone de DJI et sa radiocommande, variable selon l’environnement, de quelques centaines de mètres à plusieurs kilomètres. La version fixe du produit équipée d’antennes à fort gain permet une détection à plus grande distance, jusqu’à 50 km théoriques – c’est beaucoup moins en pratique et de manière très directionnelle par rapport aux antennes.

Pourquoi c’est un problème, AeroScope ?

La pertinence de l’usage qui est fait d’AeroScope dépend de ceux qui l’opèrent. L’Ukraine a critiqué l’utilisation d’AeroScope par l’armée russe : le produit permet de connaitre la position du pilote, ce qui est une information particulièrement sensible en temps de guerre. La Russie a critiqué l’armée ukrainienne pour les mêmes raisons ! Les deux parties utilisent ce produit (voir ici), c’est l’une des raisons pour lesquelles DJI a décidé l’abandon temporaires de ses activités commerciales dans ces deux pays (voir ici).

Les données chiffrées ?

Plusieurs hackers ont critiqué durement le système de diffusion des données de DJI. La raison ? Ils ont affirmé que les données étaient diffusées sans chiffrement, en clair, contrairement à ce qu’avait affirmé un porte-parole de DJI.

« En clair » ?

C’est à nuancer : les trames des données diffusées par DJI ne sont pas faciles à capturer. Un code source pour réaliser un outil a été diffusé récemment, en 2023 (voir ici), mais la mise en oeuvre pratique d’un équivalent de lecteur AeroScope n’est pas à la portée de tout le monde, loin s’en faut. 

Pourquoi l’arrêt d’AeroScope ?

AeroScope de DJI, version fixe.

L’ancien VP Policy & Gov Relation de DJI, Brendan Schuman (désormais chez Boston Dynamics), donne un début de réponse sur Twitter. « 1. Cela n’a aucun sens de maintenir une fonctionnalité qui a été créée pour aider les intérêts de sécurité des États-Unis quand on est constamment attaqué par les agences de sécurité américaines. 2. Le Remote ID de la FAA est en cours de mise en œuvre ». Que veut-il dire ?

1. Où vont les données ? 

L’outil de DJI destiné à protéger des zones sensibles s’est retourné contre lui : le constructeur a été accusé de capturer des données, de les stocker sur ses propres serveurs et de les mettre à disposition du gouvernement chinois – parce que c’est une entreprise chinoise. 

2. Les réglementations s’inspirent de DJI

La diffusion des données pendant le vol est opérationnelle chez DJI depuis 2016. Les réglementations s’en sont manifestement inspirées.

  • Aux Etats-Unis, l’idée a été reprise à son compte par la Federal Aviation Administration (FAA) en 2019, qui l’a désormais rendue obligatoire sous le nom Remote ID (voir ici). Le Remote ID sera imposé à tous les drones à compter du 16 septembre 2023 aux Etats-Unis.
  • L’Europe avait suivi exactement le même chemin avec l’identification directe à distance, intégrée dans la réglementation en 2019, et imposée pour tous les drones avec indication de classe. L’identification directe à distance sera obligatoire sur tous les drones vendus en Europe à compter du 1er janvier 2024.
  • La France a aussi imposé son signalement électronique à distance, mais uniquement pour les drones de plus de 800 grammes. Un requis inscrit dans la réglementation en 2016, mais qui n’a été décrit pour application que fin 2019.

Et donc ?

Puisque 1. la fonctionnalité pose problème, 2. les réglementations imposent leur propre version de la diffusion des données de vol en temps réel, autant l’abandonner. Ce sont sans doute les principales raisons pour lesquelles le récepteur AeroScope n’est plus en production. Cela dit, il n’est pas certain que la fonction de diffusion des données (du côté du drone) soit aussi abandonnée – DJI peut parfaitement conserver cet outil même en ayant stoppé la commercialisation d’AeroScope. 

Ironie de la réglementation…

La diffusion des informations en clair par DJI, notamment celle de la position de la radiocommande et du pilote, a été très critiquée – même si en pratique ces données ne sont pas accessibles à moins de disposer d’AeroScope ou d’être un hacker expérimenté.

Or le Remote ID aux Etats-Unis et l’identification directe à distance européenne diffusent les mêmes informations qu’AeroScope en clair, sans chiffrage ! Et surtout avec des outils pour les capter facilement, accessibles à tous sur de simples smartphones (voir ici). Ce qui avait été reproché à DJI… est donc désormais inscrit dans les réglementations, qui plus est avec des données bien plus faciles d’accès !

2 commentaires sur “AeroScope, l’outil de détection des drones DJI, n’est plus en production

  1. @ Bb : Je suppose que tu commentaires la news sur la possibilité de mettre en place un AeroScope-like. Je ne sais pas si la compatibilité OcuSync 3 est assurée.

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