Identification directe à distance pour les drones : pourquoi, quand et comment s’y conformer ?

Identification directe à distanceC’est quoi, l’identification directe à distance ? C’est un module qui diffuse la « carte d’identité » du drone : ses données de vol en temps réel, accompagnées par le numéro d’exploitant du drone.

« Oui mais bon, c’est pas pour tout de suite, ça ne sera imposé que plus tard, 2024 ou 2025 » peut-on entendre ou lire sur les réseaux sociaux. Et pourtant non… l’identification directe à distance, c’est maintenant pour certains drones !

Pour quoi faire ?

Les informations diffusées par l’identification directe à distance sont principalement destinées aux forces de l’ordre, « le but étant que ces informations puissent être obte­nues sans avoir physiquement accès » au drone [Règlement 2019/945 Article 2.13]. Mais, nous allons le voir, tout le monde peut potentiellement accéder à ces données en temps réel.

Comment ça fonctionne ?

Pendant toute la durée du vol, l’identification directe à distance diffuse le numéro d’exploitant UAS, le numéro de série du drone, la date et l’heure, la position du drone, la hauteur de vol par rapport au point de décollage, le cap, la position du pilote ou à défaut du point de décollage, une indication du statut d’urgence du drone.

Qui est concerné ?

  • La réglementation européenne requiert que tous les drones de classes C1, C2 et C3 soient équipés d’un système d’identification directe à distance [Règlement 2019/945 Annexe, parties 2, 3 et 4].
  • Les autres drones, ceux sans classe et ceux de classes C0 et C4, ne sont pas tenus à disposer de l’identification directe à distance [Règlement 2019/945 Annexe, parties 1 et 5]. 

Quand  ?

  • Pour les drones de classes C1, C2 et C3, l’identification directe à distance est obligatoire. C’est d’ores et déjà le cas en 2023, ce sera toujours le cas en 2024 et plus tard. Attention, ce n’est pas un requis exigible seulement à partir de 2024 comme on l’entend parfois : il est imposé à tous les appareils de classes C1, C2 et C3, maintenant.
  • Pour les drones sans classe, l’identification directe à distance n’est PAS requise. Ni en 2023 ni en 2024 ni plus tard.
    MAIS une disposition du règlement 2019/947 permet aux Etats membres de l’Union Européenne de restreindre certaines zones géographiques aux seuls drones équipés de l’identification à distance, qu’ils soient avec une classe ou sans classe. La France n’a pas (encore ?) indiqué de telles zones. 

Des exemples ?

Un DJI Mavic 3 Classic est de classe C1, il doit d’ores et déjà diffuser l’identification directe à distance. Idem pour un DJI Mavic 3 Pro (classe C2), un DJI Air 3 (classe C1), un DJI Inspire 3 (classe C3).

Mais pour les DJI Mini 3 Pro, Mini 3, Mini 2, Mini 2 SE, Mini, Mavic 2, Air 2S, les Autel Robotics Evo, les Fimi, les Potensic, les FPV racers, le Mini 4 Pro, qui sont sans classe ou de classe C0, pas besoin de l’identification directe à distance.

Il y a des cas particuliers : le Mavic 3 d’origine, par exemple, est sans classe donc sans besoin d’identification directe à distance. Mais il est possible de lui attribuer la classe C1 de manière rétroactive via une procédure auprès de DJI. Dans ce cas, l’identification directe à distance devient obligatoire.

A savoir : une liste des drones disposant (réellement) d’une indication de classe se trouve ici. Attention, certaines sources, dont l’EASA (!), ont publié des listes de drones qui ne sont pas ou pas encore certifiés avec une classe.

Comment régler l’identification directe à distance ?

Le module d’identification directe à distance est mis en place par le constructeur du drone, c’est un composant nécessaire pour valider la conformité aux classes C1, C2 ou C3. Cette conformité est vérifiée par un « organisme notifié » (c’est-à-dire une société autorisée par un état à évaluer la conformité de produits).

Mais pour qu’il soit opérationnel, le module doit être renseigné avec le numéro d’exploitant UAS du drone et il doit être activé. Ce n’est pas au constructeur de le faire, lui ne fournit que l’outil. Les réglages sont donc de votre responsabilité. Je prends l’exemple du Mavic 3 de DJI sur lequel j’ai effectué la mise à jour vers la classe C1.

Comment renseigner et activer ?

Faites appel aux réglages avec l’icône en haut à droite, dans DJI Fly. Choisissez le premier onglet, « Sécurité ». Faites défiler jusqu’à atteindre « Identification à distance du drone » et touchez la flèche à droite.

Le « Operator Registration Number » demandé par DJI Fly est le « Numéro d’identification électronique » tel qu’il vous est fourni par Alphatango. Sur Alphatango, choisissez l’onglet « Mon activité d’exploitant », restez dans l’onglet « Général » et trouvez la ligne « Code à entrer dans le dispositif d’identification à distance ». C’est votre numéro d’exploitant UAS suivi par le symbole « – »  et 3 caractères de contrôle. 

Reportez ce code, le «  » et les 3 caractères de contrôle dans DJI Fly. L’application va automatiquement retirer le «  » et les 3 caractères de contrôle en validant le code. S’il n’est pas correct, DJI Fly vous l’indique. Veillez à activer l’identification avec l’icône, juste au-dessus du code.

Et sur d’autres drones ?

Je n’ai encore jamais eu en mains de drones avec classes C1, C2 ou C3 autres que ceux de DJI, je n’ai par conséquent aucune autre expérience de la saisie du code à entrer dans le dispositif d’identification à distance.

En théorie, le manuel du drone doit pouvoir vous renseigner ! car la documentation du drone, et c’est un requis imposé au constructeur par le règlement 2019/945, doit indiquer « les procédures pour charger le numéro d’enregistrement de l’exploi­tant de l’UAS dans le système d’identification à distance ».

A savoir : les drones de DJI de classe C0 et sans classe ne donnent pas accès aux réglages du « Operator Registration Number », puisqu’ils ne sont pas tenus à l’identification directe à distance.

Qui est responsable de la manipulation ?

Les textes de la réglementation européenne n’indiquent pas qui doit mettre en place l’identification directe à distance. Puisqu’elle repose sur le numéro d’exploitant UAS, on pourrait supposer que c’est à l’exploitant UAS de le faire.

Mais le texte précise que c’est au pilote du drone de « vérifier si l’identification directe à distance est active et actualisée ». Ce n’est donc pas à l’exploitant UAS de s’assurer du bon fonctionnement de l’identification directe à distance (sauf si l’exploitant UAS est aussi le pilote). [Règlement 2019/947 UAS.OPEN.060 1)d].

« Active et actualisée » : comment le vérifier ?

La question est importante, puisque dans le cas des drones de DJI, les réglages ne permettent pas de savoir si l’identification directe à distance fonctionne vraiment ! car on entre le code dans DJI Fly, on active, et puis… on suppose que ça fonctionne.

La solution, c’est d’utiliser une application capable de détecter l’identification directe à distance diffusée par un drone. Je n’ai trouvé que 3 logiciels sur smartphones : OpenDroneID OSM (Android), Drone Scanner (Android et iOS) et Air Sentinel (Android). OpenDroneID OSM ne semble malheureusement pas compatible avec des Android récents.

OpenDroneID OSM (Android).

En pratique ?

Téléchargez l’application, installez-la. Assurez-vous que l’identification directe à distance est configurée sur votre drone. Lancez l’application. Faites décoller votre drone.

Après quelques secondes, l’application devrait détecter le signal d’identification directe à distance et l’indiquer dans l’interface. La représentation graphique de l’endroit montre le point de décollage, et un tracé correspondant au vol. Vous pouvez aussi obtenir le détail des données fournies par l’identification directe à distance. Si le drone ne dispose pas de coordonnées GPS, il est tout de même indiqué, mais sans matérialisation de sa position.

Et ça fonctionne ?

Oui, ça fonctionne… plus ou moins. Selon les smartphones, les applications tournent correctement ou de manière hésitante avec des plantages, en tirant parti de certaines fonctions wifi et Bluetooth. Le point commun entre tous les apps, c’est l’absence de détection en temps réel. Elles souffrent d’une latence si importante qu’elle empêche le suivi d’un drone en temps réel. Pire, il s’est parfois passé plusieurs minutes avant que les apps ne détectent un drone en vol ! Ensuite la fréquence de mise à jour de la position est lente, c’est le moins que l’on puisse dire.

Drone Scanner (Android).

Ok, alors ça sert à quoi ?

Nous l’avons vu, vérifier que l’identification directe à distance est opérationnelle constitue un requis réglementaire imposé au pilote. Ces apps permettent de vérifier qu’elle fonctionne. C’est déjà ça.

Mais encore ? 

Même si le positionnement du drone souffre d’un énorme retard, ces applications permettent de détecter qu’un appareil est en vol avec une indication de son numéro de série. Et du numéro de son exploitant UAS (s’il est indiqué). Et potentiellement de la position du point de décollage (si le GPS est opérationnel). Des informations intéressantes pour les forces de l’ordre…

Mais pas que… Quelqu’un qui serait très, très en colère d’entendre ou de voir un drone voler près de lui pourrait utiliser ces informations pour partir à la rencontre du pilote, de manière aimable… ou pas du tout !

Quelles sont les peines en cas de manquement ?

Air Sentinel (Android).

Si à l’occasion d’un contrôle, les forces de l’ordre découvrent que votre drone n’est pas conforme au requis d’identification électronique, que risquez-vous ? En l’absence de textes indiquant les peines encourues, il y a peu de chance d’être verbalisé pour cette raison.

Mais la défaillance invitera les forces de l’ordre à vérifier les autres points réglementaires. Et puis en cas d’accident ou d’incident grave, un manquement à l’identification directe à distance peut jouer en votre défaveur devant un tribunal. Ou si un assureur cherche à vérifier la conformité du vol pour éviter d’indemniser…

A savoir

La réglementation française impose le signalement électronique à distance (français) pour tous les drones de plus de 800 grammes. Il a été introduit par la loi dite « drones » de 2016. Ce n’est PAS de cela qu’il est question dans ce post, qui traite exclusivement de l’identification directe à distance (européenne) ! Les drones de classes C1 à C3 ET pesant plus de 800 grammes doivent donc, en l’état de la réglementation, diffuser simultanément l’identification directe à distance (européenne) ET le signalement électronique à distance (français). Une double pleine imposée aux pilotes… respectueux de la réglementation, en quelque sorte.

19 commentaires sur “Identification directe à distance pour les drones : pourquoi, quand et comment s’y conformer ?

  1. Bonjour Fred, j’ai un DJI Air3 , il fait moins de 800g donc je ne l’ai pas enregistré sur Alpha Tango pour le numéro UAS

    Faut t’il ou pas l’enregistrer et apposer le numéro UAS sur le drone ou enregistrer uniquement l’identification
    à distance car perso j’étais toujours sur la réglementation Française. Merci à toi.

  2. @audoye : <800g, c'est juste le numéro d'exploitant sur l'étiquette et l'identification directe à distance. Pas d'enregistrement du drone ni de signalement électronique à distance…

  3. Hello Fred, ça veut dire qu’il n’y a plus d’obligation d’identification à distance pour les drones de construction personnelle ? De mémoire les drones de +800g étaient concernés

  4. Hello, qu’est-ce qu’un drone sans classe ? Est ce que mon planneur en balsa de 2Kg est un drone dans classe ou un C3 ? Est-ce que la déclaration alpha tango suffit ou faut-il un dispositif d’identification à distance ?

  5. @ Xoci : Ah ben pour une fois, la réponse est simple. S’il n’y a pas d’indication de classe sur un appareil, il est sans classe. Donc pas d’identification directe à distance européenne.

  6. @Fred :
    Dans ta phrase « Mais pour les DJI Mavic 3 Pro, Mini 3, Mini 2, Mini 2 SE, Mini, Mavic 2, Air 2S, les Autel Robotics Evo, les Fimi, les Potensic, les FPV racers, le Mini 4 Pro, qui sont sans classe ou de classe C0, pas besoin de l’identification directe à distance. », il ne faudrait pas remplacer « DJI Mavic 3 Pro » par « DJI Mini 3 Pro » ?

  7. Ben, je dis que quand même on se sent rassuré, parce qu’avec l’augmentation de la recrudescence, ça va permettre de coincer ces salopards qui voudraient faire péter une centrale nucléaire en balançant un Mavic 3 pro dans une descente vertigineuse vers le réacteur !
    Et si la police a du mal à surveiller tout ça, on pourra créer un peu partout des milices armées de simples smartphone qui iront débusquer les pilotes de ces trucs pour leur apprendre à se mêler de ce qui les regarde !

  8. @ Max Artaud : Oui, les dives de Mavic 3 Pro sur les centrales, ça fait frémir. Il est temps d’équiper les voisins de centrales de lance-pierres, plutôt que de boites de pilules d’iode ! 😀

  9. Fred, tu ne parles pas des C5 et C6, type eBee ou uX11. Eux aussi ont obligation d’avoir de l’identification directe à distance.

  10. Fred , « la hauteur de vol par rapport au point de décollage »
    Quid de cette hauteur puisqu’on peut suivre le relief et à 300m de moi être à hauteur de 400m au dessus de mon point de décollage parce je suis au dessus de la colline en face à 60m au dessus du sol …
    Bon, si t’arrives à suivre …

  11. @ claudius62 : les données doivent contenir la  » hauteur au-dessus de la surface ou du point d’envol; « . C’est encore différent du  » point le plus proche de la surface de la Terre « . Bref je suppose que ça va être simplifié en hauteur par rapport au point d’envol. Et s’il y a contrôle en temps réel… eh ben il va falloir espérer que le contrôle soit fait en connaissance des particularités d’un éventuel relief 😉

  12. Salut Fred,
    J’ai essayé l’application Drone Scanner (IOS) avec mon Mavic3Classic en vol. Cela n’a rien détecté. Sur DJIFly, l’identification directe à distance était bien active et renseignée, et le wifi+Bluetooth activés sur mon iPhone.
    Je vois dans ton test que tes essais ont été réalisés sur Androïd. Mais avais-tu pu tester Drone Scanner avec succès sur IOS ?

  13. @ Fred1 : Non, je n’ai pas essayé, je n’ai pas d’appareil iOS sous la main…
    Sur Android, tous les matériels ne sont pas pris en charge, notamment le module wifi. J’imagine que c’est idem sur Apple, en plus verrouillé ?

  14. @fred
    Petite question bête, mon Mini 4 pro est déclassé depuis fin 2023 car je fait des vols en montagne. Y a-t-il un intérêt que je le classe en C1? Cordialement, Fabien.

  15. @ Fabien : Côté technique, non, aucun intérêt.
    Côté réglementation, il y a discorde sur le statut du Mini 4 Pro classifié.
    – Pour ceux qui le considèrent comme uniquement opérable en catégorie Spécifique, il y a intérêt à le passer en C1 pour le rendre à nouveau utilisable en catégorie Ouverte.
    – Pour ceux qui le considèrent comme opérable en catégorie Ouverte sous-catégorie A1, il n’y a pas d’intérêt à le passer en C1.
    Je dirais que dans le doute, mieux vaut le passer en C1. Ca ne change rien côté technique.
    Côté réglementaire, c’est l’assurance de pouvoir voler en étant conforme à la réglementation (dans son interprétation la plus dure), mais ça interdit de voler au-dessus de personnes (sauf de manière involontaire).

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