Pourquoi n’y a-t-il encore aucun drone marqué CE avec une indication de classe ?

EDIT : il existe désormais plusieurs drones avec une indication de classe, dont la liste est à consulter ici !

La suite de ce post est donc obsolète, mais conservée pour garder un historique des évolutions de la réglementation européenne.

Pour mémoire, la réglementation européenne va imposer un marquage CE avec indication de classe (C0 à C4) pour pratiquer en catégorie Ouverte. Attention, il ne s’agit pas d’un « simple » marquage CE, que la plupart des drones ont déjà, mais de l’indication de l’appartenance à une classe telle que définie par la réglementation européenne. A partir du 1er janvier 2023 (décalé au 1er janvier 2024), l’indication de classe sera une obligation pour utiliser un drone en catégorie Ouverte, sauf exceptions ! Pourquoi, à ce jour (11 juillet 2021), n’existe-t-il aucun drone vendu dans le commerce avec marquage CE et indication de classe ?

Les explications…

C’est aux constructeurs de mettre en œuvre les moyens pour rendre leurs appareils conformes aux exigences des classes européennes, notamment en faisant appel à un « organisme notifié » en mesure d’examiner cette conformité. Ce qui pêche ? Les normes qui décrivent les exigences de chaque classe n’ont pas encore été publiées. Pas même pour les appareils de classes C0 et C4, celles avec le moins de requis techniques ! Le cheminement pour aboutir à une norme est le suivant : les standards sont conçus par l’Association des Industries Aérospatiales et de Défense de l’Europe (ASD-STAN), puis normés par le Comité européen de normalisation (CEN). Pour la catégorie Ouverte, classes C0 à C4, la norme décrit :

  • les exigences communes aux classes C0 à C4.
  • le système d’identification directe, aussi appelé Digital Remote ID (DRI). C’est un système qui diffuse les informations du drone à distance, pour connaître son propriétaire, sa position, etc.
  • la géovigilance, autrement dit le fait que le drone prévienne son pilote à l’approche d’une zone géographique à accès interdit, restreint ou soumis à conditions.
  • le signalement lumineux pour les vols de nuit. 

Quelques précisions…

Les 4 documents draft (textes préliminaires) sont disponibles en consultation. Attention, « disponible » ne signifie pas librement accessible : le CEN commercialise les documents en version sans limite de temps, ou limitée à la consultation à la journée. Une version preview avec le sommaire est disponible gratuitement. 

  • Le document « Partie 001 : Exigences produit et méthodes de vérification » est disponible. Il passe en revue tous les critères notés dans le règlement 2019/945, comme la gestion de la batterie, de la liaison radio, de la puissance sonore (qui devra être indiquée visuellement pour les classes C1 et C2), etc.
  • Bien que le document « Partie 002 : Exigences d’identification directe à distance » ne soit pas encore définitif, le constructeur Parrot a été le premier à dégainer ! Il propose d’ores et déjà sur ses drones de la gamme Anafi le Digital Remote ID européen (DRI), autrement dit le système d’identification à distance (voir ici). On ne sait toujours pas si les administrations se sont coordonnées pour éviter de subir un double système d’interrogation de drone à distance en France pour les appareils de plus de 800 grammes, le « système d’identification directe » européen et le « signalement électronique à distance » français.
  • La géovigilance va reposer sur un fonds de cartes dans un format commun à tous les pays membres de l’Union Européenne. Vous avez sans doute déjà constaté les erreurs par omission ou par simplification que l’on trouve dans le service Geoportail, vous pouvez imaginer la complexité d’élaboration de ce fonds à l’échelle européenne ! Et pourtant, c’est pour bientôt. Nicolas Marcou, directeur de programme Drones à la Direction de la sécurité de l’aviation civile (DSAC), a indiqué que « les informations relatives aux zones géographiques UAS seront publiées par la DGAC à compter du 1er janvier 2022 ». Est-ce que cela signifie que rien ne pourra se passer avant cette date ? Peut-être que si : Natale Di Rubbo, Project Manager Drones à l’EASA, m’a indiqué que la conformité aux requis techniques des drones pour la géovigilance « est indépendante de la disponibilité des bases de données ». En d’autres mots, la géovigilance pourra être ajoutée aux drones même si les cartes ne sont pas encore disponibles. Elle reposera sur le document « Partie 003 : Exigences de géovigilance ».
  • Le signalement lumineux est-il sans objet en France, puisqu’il ne concerne que les vols de nuit et que ces vols de nuit sont interdits en France en catégorie Ouverte ? L’arrêté Espace du 3 décembre 2020, Art. 3.3°, interdit bel et bien les vols de nuit en catégorie Ouverte et ne propose pas de dérogation. Pourtant étonnamment le guide de la catégorie Ouverte, point 7. indique qu’« une dérogation à cette interdiction peut néanmoins être demandée au préfet territorialement compétent ». On peut supposer que cette dérogation absente des textes est accordée pour des usages professionnels en catégorie Ouverte sur justification de mesures de sécurité satisfaisantes – et qu’elle a peu de chances d’être accordée dans le cadre d’un usage loisir. Dans ce cas, le signalement lumineux européen devra être intégré au drone, en conformité avec le document « Partie 004 : Exigences de signalement lumineux ». A noter : ce document draft recommande les couleurs rouge, verte et blanche pour la catégorie Ouverte. Pour mémoire, l’arrêté du 27 décembre 2019, chapitre 2, Art.5.1° proscrit, pour les vols en scénarios nationaux, l’usage du… rouge et du blanc !

Les constructeurs ne sont pas pressés…

Puisque les standards ne sont pas encore finalisés, il est peu probable de voir des drones commercialisés avec indication de classe avant… un certain temps. Les divers interlocuteurs à qui j’ai posé la question m’ont dit de pas savoir quand les standards allaient être publiés. Il est probable que ce soit au courant du dernier trimestre 2021, au mieux. Dans la mesure où les requis pour assurer la conformité avec les différentes classes sont lourds à mettre en œuvre, à faire vérifier par les organismes notifiés, et que cela introduit un coût et des délais supplémentaires, il y a peu de chances de voir apparaître des drones avec indication de classe en 2021. Certains constructeurs espèrent négocier un marquage CE avec indication de classe rétroactive (voir ici) pour leurs drones déjà commercialisés.

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