DJI Mavic 3 Enterprise, la prise en mains

Les caractéristiques du Mavic 3 Enterprise, ou Mavic 3E, le destinent à des usages professionnels. Pourquoi ? Parce qu’il est doté d’une caméra capable de réaliser des clichés rapidement et avec une haute plage dynamique, parce qu’il est prévu pour accueillir des accessoires comme un complément GPS RTK ou un haut-parleur. Il est livré avec une radiocommande haut de gamme, la RC Pro Enterprise, et piloté par le logiciel DJI Pilot 2. On est loin du Mavic 3 avec sa radicommande DJI RC et le logiciel DJI Fly orienté grand public… Que vaut cet appareil ? DJI m’en a prêté un pendant quelques semaines pour répondre à la question. Comme d’habitude, dites-moi si la pratique a influencé mon jugement. Notez que vous pouvez télécharger des photos et vidéos brutes pour les analyser de votre côté, ça se passe ici

Les caractéristiques ?

Je ne vais pas reprendre l’intégralité des caractéristiques techniques du Mavic 3E, vous pouvez les retrouver ici. En revanche, je vais vous présenter les conséquences des choix techniques de DJI pour l’exécution de différentes tâches.

L’obturateur mécanique, selon DJI

Le bloc image du Mavic 3E repose sur un capteur CMOS 4/3’’ associé à un obturateur mécanique. A quoi ça sert ? Les drones sont pour la plupart équipés d’un obturateur électronique dont le défaut est l’effet de déformation de mouvement (rolling shutter). C’est un souci majeur lorsque les images sont traitées par un logiciel de calcul, puisqu’elles sont inutilisables. L’obturateur du Mavic 3E permet, selon DJI, de réaliser des clichés toutes les 0,7 secondes. Pas mal pour accélérer les missions photogrammétrie !

L’obturateur mécanique, en pratique

Avec une luminosité assez forte, le Mavic 3E parvient effectivement à réaliser des photos toutes les 0,7 secondes en conservant une qualité très satisfaisante. Donc oui, les missions peuvent être accélérées. Mais si la luminosité baisse, on ne coupe pas à l’apparition de flou de bougé, à moins d’augmenter la valeur ISO et d’introduire du bruit. Pour réussir des shootings 3D, il est préférable de voler par temps nuageux pour effacer les ombres… Et donc avec une faible luminosité. Dans ce cas, il est recommandé de réduire la vitesse du drone et d’augmenter dans le même l’intervalle de prises de vues pour ne pas se retrouver avec beaucoup trop de clichés.

La dynamique élevée, en pratique

Le capteur du Mavic 3E offre une belle plage dynamique qui permet d’obtenir des contrastes marqués. En pratique, les photos montrent les détails de feuilles d’arbres, de brins d’herbes et surtout, des nuances dans les tons clairs. De quoi, par exemple, distinguer des traces de pas dans la neige, voir le contour des nuages, etc. Ce point fort est bénéfique pour les travaux de photogrammétrie, mais aussi pour les panoramas et globalement toutes les images qui sont réalisées dans des conditions météorologiques difficiles.

Les modes photo et vidéo

Il n’y a pas de surenchère des modes vidéo : le Mavic 3E filme en 4K 3840 x 2160 en 30fps, et en Full HD 1920 x 1080 en 30fps. Ni en modes photo : il y a les mode Unique et Intelligent (5280 x 3956 pixels), Intervalle et Panorama. Je n’ai pas réussi à identifier clairement le fonctionnement des modes Unique et Intelligent : il ne s’agit de pas de mode sans HDR / avec HDR, et les résultats sont très variables selon les conditions de shooting. Le plus souvent, ce sont les clichés Unique que j’ai utilisés : ils offraient une plus grande dynamique et une meilleure netteté. Il est possible d’ajouter un horodatage en surimpression des images.

Le stockage des photos et vidéos ?

Les fichiers sont stockés sur une carte mémoire microSD. Il n’y a pas de mémoire interne.

Les hélices

Ce sont des modèles faciles à installer et à retirer. A la différence de celles du Mavic 3 et leurs bouts en caoutchouc, les pales de celles du Mavic 3E sont faites d’un seul bloc, sans les bouts en caoutchouc. Est-ce que cela change quelque chose ? Non, je n’ai pas noté de différence, ni sur le volume sonore, ni en réactivité de pilotage. Elles sont libellées « 9453F pour le modèle Enterprise ». DJI indique que les hélices des deux gammes ne sont pas compatibles. 

L’application DJI Pilot 2

A la différence du Mavic 3 qui s’appuie sur l’application DJI Fly orientée grand public, le Mavic 3E fonctionne avec DJI Pilot 2, l’outil destiné à sa gamme de drones professionnels. L’accent est mis sur la sécurité des vols avec des écrans récapitulatifs du système avant le décollage (des checklists). Dans le Health Management System (HMS), on voit d’un coup d’oeil l’état de l’appareil, avec des voyants au vert quand tout va bien, orange pour un avertissement, et rouge quand tout va mal. DJI Pilot 2 n’est pas déroutant quand on a utilisé DJI Fly ou DJI GO 4. On retrouve les principales informations, celles de la télémétrie avec hauteur de vol, altitude, vitesses, cap, GPS, réglages caméra, autonomie estimée, etc. DJI Pilot 2 permet de personnaliser les nombreux boutons de la radiocommande RC Pro Enterprise, de manière très satisfaisante pour se constituer un ensemble de commandes et de réglages accessibles très rapidement.

La sécurité des données

Parce que DJI est régulièrement accusé de trous de sécurité, l’application DJI Pilot 2 propose un chiffrement des données en AES-256, et un mode Données locales qui promet de ne laisser échapper aucune donnée hors du drone et de sa radiocommande, même si elle est connectée à Internet. Dans ce mode, les mises à jour sont installées manuellement, sans connexion sur le réseau. Si vous choisissez d’utiliser les services Cloud, ils sont hébergés par Amazon Web Services (AWS). DJI permet aussi d’effacer totalement les données du drone et de la radiocommande.

Ce que n’offre pas DJI Pilot 2 ?

Les fonctions grand public de DJI Fly ne figurent pas dans DJI PIlot 2. Comme par exemple ActiveTrack pour le suivi de cibles, les Timelapse, les photos grand angle horizontales et verticales. C’est bien dommage, parce qu’il n’y a pas de raison matérielle pour ces limitations. Ce qui est encore plus dommage, c’est que l’application DJI Fly n’est pas du tout compatible avec le Mavic 3E. Le sera-t-elle un jour ? Ce n’est pas prévu par DJI à ce jour. Dommage aussi que DJI Pilot 2 ne permette pas l’usage de plusieurs radiocommandes RC Pro Enterprise (pour plus de sécurité, pour un pilotage de la caméra indépendant de celui du drone, pour un double commande, etc).

La RC Pro Enterprise ?

La RC Pro (RM510) destinée aux Mavic 3 et Air 2S et la RC Pro Enterprise (RM510B) pour les Mavic 3E et 3T sont des radiocommandes très semblables. Même taille, même poids, même écran et même luminosité, même retour vidéo en 1080p à 30fps en 5,8 et 2,4 GHz, avec une portée maximale de 8 km selon DJI. Mais le protocole radio utilisé par le Mavic 3E et la RC Pro Enterprise est le « Entreprise DJI O3 », différent du O3+ (je ne sais pas ce qui distingue ces deux protocoles). Je n’ai pas tenté de mesurer sa portée maximale pour rester conforme à la réglementation. Mais cela ne fait aucun doute : comme d’habitude il s’agit d’une valeur très, très optimiste… La RC Pro Enterprise offre une mémoire interne de 64 Go au lieu de 32, et un micro intégré pour enregistrer les captures vidéo de l’écran (mais le son était très médiocre lors de mes essais).

Les « PinPoints »

Il est possible de placer des « PinPoints » sur la carte, autrement dit des bornes virtuelles matérialisées par des losanges bleus. Ces losanges apparaissent en surimpression du retour vidéo pour indiquer leur direction. Parfait pour jalonner le terrain s’il manque de repère visuels ! DJI Pilot permet de configurer ces PinPoints avec des couleurs, de les relier jusqu’à créer des surfaces. Intéressant !

La gestion du zoom

Le capteur principal du Mavic 3E est complété par un capteur destiné aux zooms. Il prend le relais passés 7X. Par défaut, c’est l’image issue du capteur principal qui apparait dans le retour vidéo. Mais en touchant la mention Zoom, on passe sur le capteur dédié, qui permet d’aller jusqu’à 56X ! Evidemment, la qualité est dégradée en zoom maximal, notamment par les turbulences atmosphériques, mais le résultat est impressionnant et permet de distinguer de détails à longue distance. Passer de Zoom à Wide permet de pointer facilement une zone et de zoomer dessus directement. La stabilité du Mavic 3E en vol et celle de la nacelle permettent d’obtenir une image qui bouge peu, même avec un peu de vent.

Les panoramas

Il n’y a à vrai dire qu’un seul type de panorama : c’est la Sphere, à 360°. Ou presque, car la caméra ne s’incline pas complètement vers le haut. Il manque des clichés pour la partie ciel. Ce n’est pas un souci avec un ciel bleu ou uni, mais c’est dommage en présence de nuages. En revanche, la dynamique élevée permet d’obtenir des clichés avec beaucoup de détails, y compris dans la végétation et les nuages. Un autre point intéressant : il faut au Mavic 3E 30 secondes pour réaliser les 25 clichés d’une Sphere, puis 30 secondes pour les assembler en une image 360°. Soit une minute en tout ! Pas mal… Les images sont également stockées pour un usage avec votre propre logiciel 360°. 

Les plans de vol automatisés

DJI Pilot 2 propose d’automatiser des vols pour satisfaire à différents types de missions. Il y a la fonction Waypoint, pour indiquer un itinéraire reposant sur des points de passage. Pratique pour réaliser un suivi de chantier en collectant des images sur des points précis au fil du temps. Il y a la fonction Cartographie qui permet de réaliser des vols en quadrillage d’une zone, principalement pour des missions basées sur les orthophotos. Il y a la fonction Oblique pour les missions de photogrammétrie 3D en 5 passes. Enfin il y a la fonction Linéaire pour effectuer le suivi d’un chemin, d’une route, d’une ligne haute-tension, téléphonique, etc. Et si aucune des fonctions ne convient à vos besoins ? Vous pouvez aussi préparer vos propres plans de vol avec d’autres logiciels, pour peu qu’ils soient capables de les exporter en .kmz. Pratique.

Les plans de vol automatisés, en pratique

Ces outils sont intégrés dans DJI Pilot 2, opérationnels, et tirant parti des caractéristiques du Mavic 3E, notamment son obturateur mécanique rapide. Ils conviennent pour un bon nombre d’usages et profitent de nombreux réglages dont la hauteur, le taux de superposition, l’ajout d’une marge. Ils gèrent automatiquement le décollage, l’atterrissage si vous le souhaitez, l’autonomie du drone, avec un retour automatique quand c’est nécessaire pour changer de batterie, et prennent en charge la poursuite de la mission. Mais comme souvent avec des outils de planification, ils montrent leurs limites si vous avez des besoins spécifiques. Ou si vous êtes attentif à l’optimisation des vols. 

L’optimisation des vols ?

Les outils de DJI Pilot 2 shootent des photos à intervalles réguliers, sans tenir compte de l’itinéraire et des virages. Le résultat, ce sont parfois des accumulations de clichés à certains endroits, sans que cela ne serve vraiment, et de nature à induire les outils de reconstruction en erreur. C’est particulièrement le cas du mode Oblique avec ses 5 passes qui aboutissent à un nombre impressionnant de clichés. Lequel a mis en défaut les logiciels RealityCapture et WebODM lors de mes essais ! J’ai regretté les double-quadrillages de zones que proposent des outils comme Pix4D, plus efficaces que le mode Oblique trop gourmand (même s’il est possible de ne pas lancer les 5 missions).

Les batteries

Ce sont exactement les mêmes que celles de Mavic 3 – c’est une bonne nouvelle ! Elles assurent une autonomie de 45 minutes en vol normal et 38 minutes en stationnaire, selon DJI. En pratique, l’appareil vole en stationnaire pendant 30 minutes et 38 secondes avant de prévenir de la batterie faible. Il permet de rester en vol pendant encore 3 minutes, ce qui fait au total un peu plus de 34 minutes de vol effectif. On est donc assez proche de la promesse du constructeur ! Ensuite le Mavic 3E impose l’atterrissage, qu’il est possible d’empêcher en surpilotant pendant 5 minutes 30. ll se pose définitivement au bout de 39 minutes et 30 secondes.

Charger les batteries

Le Mavic 3E est livré avec un chargeur en USB-C alimenté par le secteur. Il offre une charge rapide des batteries : on est opérationnel en un peu plus d’une heure (ou moins si la batterie n’était pas totalement déchargée).

Modes discrets

Certaines missions exigent une absence de signalisation du drone. L’option LED de navigation permet de couper les feux auxiliaires. Le mode Discret coupe tous les feux, y compris le feu auxiliaire vertical à l’atterrissage et les LED d’indication de fin de batterie. Vraiment tous ? Non, ceux, verts, de la batterie elle-même, restent allumés. Il est également possible de couper automatiquement les LED pendant les prises de vues pour ne pas coloriser les photos.

Les modes de vol manuels

Si vous pilotez plutôt que de préparer des plans de vol, vous avez le choix entre les modes Normal, Sport et Function. Function est intéressant puisqu’il permet un réglage en mode Tripod (pour limiter les mouvements) ou en mode Atti. Ce dernier mode désactive l’assistance au GPS, ce qui permet des évolutions sereines dans des endroits où le GPS est capté, mais mal… A noter qu’il n’y a pas d’assistance au décollage (sauf avec les plans de vol) : c’est à vous de démarrer les moteurs en croisant les joysticks, puis de pousser les gaz pour décoller.

La gestion des obstacles

Le Mavic 3E est équipé de 6 capteurs gérés par la fonction APAS 5.0. L’ensemble permet une détection des obstacles dans toutes les directions, comme le Mavic 3. Et ça fonctionne ? Oui, ça fonctionne plutôt bien, avec une matérialisation graphique de la distance dans le radar en bas de l’écran. Vous pouvez créer un plan de vol et laisser le Mavic 3E se débrouiller pour l’interrompre s’il rencontre des obstacles. Aucun souci avec des obstacles facilement identifiables, il les détecte. Mais à deux reprises il a échoué dans la détection de fils téléphoniques, avec pour punition une embardée… Les moteurs ne se sont pas coupés, il a rétabli son équilibre, mais interrompu sa mission. Par manque de confiance, je ne l’ai pas relancée. Au final ? Je n’ai plus jamais compté sur la détection des obstacles dans mes planifications de vols, mais plutôt sur des itinéraires suffisamment travaillés pour éviter tout risque de collision.

Limite, NFZ et ADS-B

Comme tous les drones de DJI, le Mavic 3E s’appuie sur le système GEO pour établir des zones interdites de vol, avec une gradation qui permet facilement ou moins facilement le déblocage. L’appareil affiche une hauteur de vol de 120 mètres par rapport au point de décollage, mais il est possible de la pousser à 1500 mètres (au lieu des 500 mètres sur les drones grand public de la marque). Le Mavic 3E est équipé d’un récepteur ADS-B : il est donc en mesure de détecter les appareils habités qui s’approchent et de vous prévenir pour entamer une manoeuvre d’évitement.

La portabilité

Le Mavic 3E est particulièrement compact pour le transport avec ses bras repliables. Il est livré dans une mallette de transport étanche dans laquelle on peut placer la radiocommande RC Pro Enterprise (sans besoin de dévisser les joysticks), 6 batteries (plus une dans le Mavic 3E, soit 7 en tout), le chargeur et ses câbles. Si vous avez besoin de ne prendre que le minimum, par exemple pour atteindre des endroits difficiles d’accès, la radiocommande, le Mavic 3E et ses batteries tiennent dans un sac à dos ! A noter que la sangle façon Hannibal Lecter des Mavic 3 a été abandonnée. Elle est remplacée par une protection de la caméra et de la nacelle en plastique, facile à mettre et à retirer.

Face à une météo capricieuse ?

Le Mavic 3E n’est pas prévu pour voler sous une forte pluie. Mais il y a peu d’éléments critiques qui soient exposés face à des projections d’eau – il est donc possible de voler sous la pluie même si ce n’est évidemment pas recommandé. DJI assure que l’appareil est opérationnel entre -10° et 40°C – même si les batteries ne sont pas autochauffantes (à vous de les garder au chaud avant de décoller). L’appareil est donné pour résister à un vent de 43 km/h. En pratique, j’ai réalisé des missions de photogrammétrie avec des bourrasques très fortes sans que l’appareil ne semble gêné : c’est très rassurant.

Les accessoires

Je n’ai pas eu accès au haut-parleur, mais j’ai pu tester le module RTK. Le principe des accessoires est simple : ils sont à fixer avec 2 vis sur le dessus du drone, avec un connecteur USB-C appelé « port PDSK » s’ils ont besoin d’être alimentés et pilotés à distance. Le kit de développement « PSDK » du Mavic 3E permet aux constructeurs de réaliser leurs propres accessoires compatibles, on devrait donc voir apparaitre des accessoires conçus par d’autres fabricants que DJI. Il n’est pas possible d’utiliser plusieurs accessoires simultanément. Le port PDSK est protégé par une languette en caoutchouc.

Le positionnement GPS

Les soucis de durée pour obtenir un fix GPS qui avaient affecté le Mavic 3 sont oubliés sur le Mavic 3E : il obtient très rapidement son fix, en captant les signaux GPS (américain), Beidou (chinois) et Galileo (européen). La précision est variable, généralement entre 1 et 5 mètres sauf en environnements difficiles comme le canyoning naturel ou urbain. 

Le positionnement avec RTK

Le RTK permet de profiter d’un positionnement GPS plus précis. Le principe repose l’usage de points de référence dont la position est connue avec précision. Ces points de référence permettent de déterminer l’imprécision du GPS à bord du drone et de la corriger.

Station mobile ou NRTK ?

Il y a deux écoles : l’usage de Ground Control Points (GCP) mobiles ou de services NRTK fixes via le réseau 4G. Dans les deux cas il faut acquérir l’accessoire RTK pour Mavic 3E.

Les stations mobiles

Le Mavic 3E est compatible avec les stations mobiles D-RTK 2 (du Phantom 4) et D-RTK 2 GNSS (du Matrice). Cette solution requiert du matériel (les stations mobiles), et de procéder aux mesures de plusieurs GCP sur le terrain. L’avantage ? Une fois la station mobile acquise, il n’y a plus de frais supplémentaires, les coordonnées des images sont corrigées avec les données de la station mobile. Les inconvénients ? Il faut investir dans la station, il faut procéder aux relevés sur le terrain, et le matériel n’est pas facilement portable.

Un réseau NRTK

Le Mavic 3E est  utiliser un service de correction GPS en temps réel (NRTK). Elle s’appuie sur des données diffusées en temps réel via le réseau 4G et un fournisseur de données. Les avantages ? Il n’y a pas de matériel additionnel à transporter, il n’y a pas besoin d’accéder au terrain physiquement. Les inconvénients ? Il faut faire appel à un fournisseur de service NRTK, et il faut une liaison 4G opérationnelle pendant le vol.

Le RTK, en pratique

Je n’ai pas accès à une station mobile RTK, je n’ai donc pas pu utiliser cette solution. Comme je ne suis pas professionnel de la photogrammétrie, je n’ai pas souscrit à un abonnement à l’un des services NRTK commerciaux, comme Orpheon ou Teria. Mais j’ai utilisé Centipede, un réseau collaboratif de bases GNSS françaises en open source (merci à Pierre-Nicolas Mazenot de JurisDrone !). Bonne nouvelle : le Mavic 3E avec l’accessoire RTK est compatible avec Centipede !

La précision en RTK ?

Elle est difficile à mesurer sans un équipement… dont je ne dispose pas. L’interface de DJI Pilot 2 indique une précision de 1 à 2 cm en x/y et 3 cm en z (élévation) lors de mes essais – mais je n’ai pas pu vérifier ces informations. Elles correspondent, cela dit, à ce que m’ont rapporté des utilisateurs professionnels du Mavic 3E avec un abonnement NRTK commercial.

Connaitre la précision ?

Si vos missions ont besoin d’une précision importante, mais sans aller jusqu’à 50 cm ou moins, la solution NRTK avec le Mavic 3E sera parfaitement adaptée puisque le risque d’une erreur importante, supérieure à 50 cm, est faible. Mais si vos travaux requièrent plus de précision, notamment sur la hauteur, il faudra l’aide de GCP pour un calibrage beaucoup plus fin. Il faudra aussi des GCP pour effectuer des contrôles du positionnement.

Le NRTK, pour quelle missions ?

Orthophoto par shooting à 12 mètres avec positionnement en NRTK avec RealityCapture.

Le NRTK convient pour les missions qui nécessitent une précision de positionnement supérieure à celle du GPS, mais en sachant que l’erreur de positionnement est difficilement vérifiable (sans GCP). Le NRTK convient aussi pour les missions sur des terrains où il n’est pas possible de s’aventurer pour déposer des GCP. Comme par exemple des zones non accessibles, des zones contaminées, des zones humides, des zones minées, des zones en pente ou à la verticale, etc. Mais s’il faut une précision centimétrique vérifiée, si le terrain n’est pas couvert par la 4G, il faut l’aide d’autres outils.

Les outils logiciels compatibles ?

Le Mavic 3E est compatible avec les outils professionnels de DJI que sont FlightHub2 pour gérer des flottes de drones, DJI Terra pour les missions de photogrammétrie. Certains éditeurs de logiciels ont ajouté la compatibilité du Mavic 3E dans leurs outils via le MSDK. Ce n’est pas encore le cas de Pix4D ni DroneHarmony, mais SkyeBrowse est compatible (sur Android uniquement pour le moment)… D’autres suivront, le temps que leurs développeurs réalisent l’intégration.

La réglementation et le Mavic 3E

Le Mavic 3E ne dispose pas d’un marquage CE avec une indication de classe européenne. 

En catégorie Ouverte (à privilégier quand c’est possible), il évoluera en sous-catégorie A3 « limitée » parce que son poids est de 1050 grammes. Rappel : le « poids » pris en compte est « la masse maximale autorisée au décollage » (MTOM), c’est-à-dire le poids maximal recommandé par DJI – différent du poids au décollage (je ne fais pas différence entre poids et masse par souci de simplification). Cette caractéristique lui impose, en Europe, de voler loin de personnes et à plus de 150 mètres des zones résidentielles, commerciales, industrielles et récréatives, que son pilote ait un identifiant UAS, suivi la formation théorique A1/A3, apposé son identifiant sur le drone. Pour voler en France, parce qu’il pèse plus de 800 grammes, il faut aussi avoir enregistré le drone sur AlphaTango et apposé ce numéro sur le drone, et configuré le signalement électronique à bord. Si vous êtes titulaire du CATT et de la formation pratique, vous pouvez utiliser le Mavic 3E en sous-catégorie A2 « limitée » : elle permet de s’approcher jusqu’à 50 mètres de personnes et de survoler des bâtiments. Ceci est valable jusqu’au 31 décembre 2023. Après cette date, le Mavic 3E restera toujours utilisable, mais uniquement en sous-catégorie A3.

Si l’appareil est utilisé dans un environnement à risque (en zone peuplée, de nuit, en zones requérant des autorisations ou des dérogations, etc.), il faut passer en catégorie Spécifique. Et donc en scénarios nationaux S-1, S-2 ou S-3 selon l’environnement. Dans certains cas, il faudra des ajouts matériels comme une coupure moteur indépendante du système principal, un dispositif de protection de tiers, etc. Ceci reste valable jusqu’au 31 décembre 2025. Après cette date, les requis définitifs de la catégorie Spécifique devront être appliqués, notamment les scénarios STS européens.

N’oubliez pas cette règle spécifique à la France pour les appareils de plus de 900 grammes, donc pour le Mavic 3E : dans les secteurs VOLTAC et les SETBA actifs, il est obligatoire de déposer une notification de vol sur AlphaTango (voir les précisions ici).

Et le marquage CE avec indication de classe de manière rétroactive ?

DJI a communiqué sur la possibilité d’obtenir un marquage CE avec indication de classe C1 pour les Mavic 3 et Mavic 3 Cine de manière logicielle, courant décembre 2022. Mais ce ne sera pas envisageable pour le Mavic 3E, parce qu’il dépasse le plafond des 900 grammes de la classe C1. Reste que DJI pourra, en théorie, proposer une indication de classe C2. De quoi piloter le Mavic 3E, en catégorie Ouverte, en sous-catégorie A2 : cela autorise de s’approcher jusqu’à 30 mètres des personnes (voire 5 mètres en mode Tripod), et de survoler des zones résidentielles, commerciales, industrielles et récréatives. DJi ne s’est pas nommément engagés pour les Mavic 3E et 3T, mais tous les espoirs sont permis puisqu’il avait déclaré ceci : « En plus de la certification C1 pour la série Mavic 3, DJI s’engage à se conformer au nouveau règlement européen pour les autres modèles de drones existants et futurs, et il travaillera avec des organismes notifiés pour obtenir des certificats de drones supplémentaires au cours de l’année à venir ».

Le futur du Phantom 4 RTK et du Mavic 2 Enterprise Advanced ?

Les produits de DJI se suivent et sont très rarement compatibles entre eux. Le suivi et la disponibilité des composants s’étiolent au bout de quelques années, ce qui rend par exemple très compliqué de se procurer des batteries neuves pour d’anciens modèles. Vous l’aurez compris, DJI a une nette tendance à forcer la main de ses clients pour remplacer ses appareils par de nouveaux… et repasser à la caisse. Les gammes Phantom 4 et Mavic 2 n’échapperont pas à cette logique commerciale, malheureusement. 

Faut-il l’acheter ?

Si vous êtes déjà équipé d’un Phantom 4 RTK ou d’un Mavic 2 Enterprise Advanced avec ou sans RTK, continuez à amortir votre équipement. Si en revanche vos missions entrainent  des exigences particulières comme la rapidité d’exécution ou des images avec une plus grande dynamique, le passage au Mavic 3E peut être pertinent. Si vous n’êtes pas encore équipé et que vous comptez réaliser des missions en photogrammétrie, le Mavic 3E est une excellente machine très efficace – même s’il lui manque encore la compatibilité avec des logiciels phares dans le domaine. Et, surtout, son prix est plutôt contenu face à la concurrence (y compris dans les gammes de DJI) puisque l’appareil est proposé à 3179 € (taxes comprises) chez DJI et des revendeurs comme StudioSPORT avec un supplément de 650 € (taxes comprises) pour le module RTK. N’oubliez pas que vous pouvez télécharger des photos et vidéos brutes pour les analyser de votre côté, ça se passe ici

D’autres photos du Mavic 3E

D’autres captures d’écran de DJI Pilot 2 sur RC Pro Enterprise

7 commentaires sur “DJI Mavic 3 Enterprise, la prise en mains

  1. Merci pour ce test attendu, je l’utilise depuis une semaine déjà et ai pu réaliser quasi 1000ha de carto, je ne le ménage pas…pour moi c’est une fusion entre un m2p et un p4p rtk en plus confort….mais l’appli, même si elle peut apporter quelques éléments intéressant (pointer des observations sur le terrain, se fabriquer des repères à la volée) ce qui existait il y a presque 10ans avec Map pilot ou d’autres…et bien on perd la capacité d’importer un shapefile ou un kml, la procédure est folklorique et on a pas que ça à faire..sur GSP ça fonctionnait très bien…toujours 2 pas en avant et un os en arrière… cette segmentation des drones DJI est dommageable également, je ne vais pas embarquer 2 drones pour cartographier et illustrer, ou avoir l’opportunité comme avant d’être au bon endroit au bon moment…on va perdre en qualité de prises de vues…vivement que le concept de couteau suisse revienne au goût du jour…

  2. Merci Fred pour ce test synthétique. En effet l’utilisation du réseau Centipède pour la photogrammétrie est très pratique. Nous l’utilisons chez Adroneex.

  3. bonjour et merci pour ces explications très utiles. Il en manque une pourtant. Si le RTK fonctionne avec un réseau 4G, comment fait-on ? Sur le Ph4 RTK, la radiocommande est équipée d’un clef 4G qui se loge à l’intérieur, sous la batterie. En revanche, je n’ai pas trouvé de solution pour le Mavic 3 que j’ai depuis 10 jours. On m’a bien proposé de maintenir mon téléphone portable en partage de connexion. Mais je trouve cela pas très commode !! Si vous avez une autre solution, je suis preneur.

    Merci d’avance,

  4. @ DENIS : L’autre solution est très semblable, elle consiste à utiliser un routeur 4G mobile qui crée un point d’accès wifi. Il y a ceux des opérateurs, ou par exemple le Netgear Aircard 797.

  5. Bonjour Fred,
    merci pour la qualité technique et de lecture de tes tests. Peux tu me dire quel logiciel tu utilises pour la reconstruction d’une mission (les 4 dernières photos de ton article). Merci

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