Etats-Unis : la FAA et la NASA encouragent le rapport d’incidents de manière anonyme. Et en France ?

Le Aviation Safety Reporting System (ASRS) est un service destiné à collecter et analyser des rapports d’incidents fournis de manière volontaire par les pilotes. Il a été conçu par la National Aeronautics and Space Administration (NASA), qui l’opère toujours pour le compte de la Federation Aviation Administration (FAA). L’ASRS a évolué avec une nouvelle extension de l’ASRS pour correspondre aux besoins des pilotes de drones. Le principe est de constituer une base de données des problèmes rencontrés avec les drones dans le but d’améliorer la sécurité des vols.

Le point important ?

Pour faciliter les rapports d’incidents sur la base du volontariat, l’ASRS applique une politique de confidentialité et d’immunité. Elle permet aux pilotes de rester anonymes s’ils le désirent, et de profiter d’une exemption de sanction pour le rapport d’un incident, même s’il résulte d’une violation accidentelle de la réglementation. Attention, cette politique ne concerne pas les accidents ni les violations intentionnelles de la loi, qui eux doivent passer par les déclarations habituelles d’accidents aériens. Une page web spécialement destinée aux pilotes de drones, professionnels et pour le loisir, permet de remplir un document pour décrire l’incident. L’ASRS publie la newsletter CALLBACK, à lire sur le site ou à recevoir par email sur abonnement (gratuit). 

Et en France ?

Il existe une procédure semblable depuis plusieurs années, documentée par le guide « incidents de drones, notification et suivi » publié sur le site de ministère en charge des transports. L’obligation de mise en place de cette procédure (pour l’état français) est exprimée par le règlement européen n°376/2014 « concernant les comptes rendus, l’analyse et le suivi d’événements dans l’aviation civile ». Il stipule que chaque état de l’Union Européenne doit avoir prévu un système de compte-rendu obligatoire et un système de compte-rendu volontaire. Le texte opère un classement en obligatoire ou volontaire selon le risque que présentent les événements.

Pour faire simple ?

Si vous êtes professionnel opérant en scénarios nationaux S-1 à S-3, vous avez obligation de déclarer les incidents de drones. Si vous pratiquez pour le loisir, vous pouvez vous passer de cette déclaration en cas d’incident parce les outils pour le faire ne sont pas adaptés. Libre à vous de décider si un incident mérite tout de même d’être documenté. Vous voulez en savoir plus ?

Selon le règlement européen n°376/2014, il faut déclarer :

  • les événements liés à des collisions
  • les événements liés au décollage et à l’atterrissage
  • les événements liés au carburant
  • les événements liés au vol
  • les événements liés à la communication
  • les événements liés à des blessures, aux situations d’urgence et à d’autres situations critiques
  • les événements liés à l’incapacité de l’équipage ou à d’autres événements concernant l’équipage
  • les événements liés aux conditions météorologiques ou à la sécurité
  • les événements liés à des conditions techniques, à l’entretien et à la réparation de l’aéronef, tels que des défauts structurels, des dysfonctionnements du système, des problèmes concernant l’entretien et la réparation, des problèmes de propulsion (y compris les moteurs, les hélices et les systèmes à rotor) et des problèmes liés aux groupes auxiliaires de puissance 

  • les événements liés aux services et aux installations de navigation aérienne
  • les événements liés aux activités des aérodromes et aux installations

En France, le compte-rendu obligatoire est imposé depuis les arrêtés de 2012. Il est matérialisé par les articles 2.1.4 et 3.3.4 dans l’« arrêté du 3 décembre 2020 relatif à la définition des scénarios standard nationaux » : il est imposé pour les vols en catégorie Spécifique sous scénarios nationaux (c’est-à-dire pour les professionnels, en simplifiant). Il est à renseigner par l’exploitant lors du bilan annuel d’activité à réaliser en janvier de chaque année sur AlphaTango.

Et pour le loisir ?

Les pratiquants de vol pour le loisir en catégorie Ouverte n’ont pas accès à la méthode de déclaration obligatoire des incidents via AlphaTango. Le compte-rendu volontaire est en revanche accessible à tous, y compris en catégorie Ouverte, en remplissant ce document. Selon le règlement européen n°376/2014, article 5, il concerne uniquement les événements qui ne font pas partie de la liste des déclarations obligatoires.

Sauf si…

Sauf si l’usager estime avoir été confronté à un « danger réel ou potentiel pour la sécurité aérienne ». Car dans ce cas il peut utiliser le compte-rendu volontaire sur la base du volontariat. Cette procédure est mentionnée par les guides « Catégorie Ouverte » et « Catégorie Spécifique ». Mais il est à noter que le document de compte-rendu français est clairement orienté vers les professionnels (dans le sens des arrêtés de 2015 abrogés en 2020, puisque libellé « expérimentations et activités particulières »), et qu’il n’a pas été mis à jour depuis avril 2016. Par ailleurs, les événements type décrits dans le guide « incidents de drones, notification et suivi » ne correspondent pas à ceux du règlement européen n°376/2014. Il faut dire que ce guide date de juillet 2018. Notez qu’il dispense l’aéromodélisme de la notification d’événements de sécurité – attention, depuis l’entrée en vigueur de la réglementation européenne, l’aéromodélisme se pratique exclusivement dans le cadre d’associations d’aéromodélisme.

La protection des déclarants

La procédure de notification française fonctionne selon le principe de la « culture juste », qui a pour but de favoriser la transparence et le partage des informations (voir ici). Elle s’appuie sur le règlement européen n°376/2014 et l’article L.6223-2 du code des Transports qui exempte de « sanction administrative, disciplinaire ou professionnelle la personne qui a rendu compte d’un événement ». Sauf dans le cas d’un « manquement délibéré et répété aux règles de sécurité ». Une protection qui pourra rassurer les exploitants professionnels – mais à ma connaissance rares sont les REX (Retours d’EXpérience) à parvenir en administrations. Elle ne suffira pas pour inciter les pratiquants de loisir à faire de même.

En conclusion ?

Les Etats-Unis et la France ont tous deux un système de déclaration d’incidents constatés avec des drones, basés sur le volontariat, avec une protection contre les sanctions. Mais les Etats-Unis encouragent tous les pilotes à émettre des notifications, alors que la France privilégie les retours de professionnels et ne facilite pas vraiment la tâche aux pratiquants loisir…

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