L’examen pour les professionnels du drone en approche

Cela fait plusieurs années que doit être présenté un examen destiné aux professionnels désirant pratiquer dans le domaine des drones. L’usage hors loisirs est décrit comme « Activité Particulière » par les arrêtés publiés en 2015. Cet examen doit remplacer le théorique ULM (examen théorique du brevet de base de pilote d’aéronef ultraléger motorisé), celui généralement choisi par les candidats puisque c’est le plus abordable des examens théoriques. Les projets d’examens ont été repoussés à maintes reprises… Les choses vont sans doute bouger plus rapidement désormais !

Deux nouveaux décrets

Ils ont été publiés au Journal Officiel du 2 février 2018, ce sont les 2018-66 et 2018-67. Le plus intéressant est le 67. Il s’appuie sur la future obligation de passage d’une formation pour tous les pilotes d’appareils dépassant un seuil de masse, pour le moment fixé à 800 grammes (Art. L. 6214-2. de la loi n° 2016-1428 du 24 octobre 2016 relative au renforcement de la sécurité de l’usage des drones civils). Cette formulation de cette loi rend la disposition applicable à tous les pilotes d’appareils de plus de 800 grammes, loisirs comme professionnels. Le décret 2018-67 apporte une nouvelle précision : les pilotes professionnels doivent détenir un « certificat d’aptitude théorique de télépilote délivré par le ministre chargé de l’aviation civile après réussite à un examen et pour la partie pratique, d’une attestation de suivi de formation délivrée par l’exploitant en charge de la formation ».

Traduction ?

Les pilotes de loisir avec un appareil de moins de 800 grammes n’auront pas de formation à suivre. Ceux avec un appareil de plus de 800 grammes devront suivre une formation théorique en ligne (probablement avec une validation par un QCM gratuit qui pourra être retenté autant de fois que nécessaire). Les pilotes professionnels, quelque soit le poids de leurs appareils (sous la barre des 150 kg), devront passer un examen théorique, probablement en centre d’examen et payant, et le réussir. La partie pratique sera limitée à une attestation de suivi de formation délivrée « par l’exploitant en charge de la formation ». On s’attendait à ce que la partie pratique soit… de la pratique réelle. Mais non. Faute de moyens, peut-être ? Qui sera l’exploitant en charge de la formation ? Un centre de formation ? Un employeur ? Soi-même quand on est indépendant ?

L’examen en question ?

Il va porter sur « la réglementation relative à l’utilisation de l’espace aérien, aux conditions d’emploi des aéronefs circulant sans personne à bord, au respect de la vie privée, à la sensibilisation des dangers liés à leur utilisation et aux sanctions encourues en cas de non-respect de la réglementation applicable. Il comporte également des éléments relatifs à la connaissance générale de l’utilisation des aéronefs circulant sans personne à bord, leurs performances et les principes du vol, à la préparation du vol, à la météorologie et ses effets sur la conduite du vol, à la navigation et à la radio navigation ». La partie pratique portera sur « la préparation du vol et de l’aéronef ainsi que sur la gestion du vol en situation normale et en situation dégradée ».

Et puis ?

Et puis ces deux décrets n’en disent pas beaucoup plus. Car c’est un arrêté qui devra préciser le programme de l’examen et les modalités de son obtention (âge, équivalences d’autres titres, lieux, coût, dates). Idem pour l’attestation de suivi de formation. Il devra aussi indiquer les documents dont devra disposer le pilote à l’occasion d’un vol. Pour en savoir plus, il va encore falloir patienter. Jusqu’à quand ? Ce sera forcément avant l’été 2018 : l’Article 2 du décret indique que l’arrêté devra être publié au plus tard le 1er juillet 2018.

Accrochez-vous

L’Art. D. 136.2-2 du décret  indique que les pilotes professionnels satisfaisant aux requis de l’arrêté Conception de 2015 sont dispensés de l’obtention du certificat d’aptitude théorique et de l’attestation de suivi de formation. Sympa, voilà qui permettrait aux détenteurs du théorique ULM de se passer des nouveaux requis ? Oui, mais est-ce vraiment le cas ? La notice en introduction du décret donne le ton : le décret « instaure également un régime transitoire ». L’Article 2 indique que les pilotes professionnels satisfaisant à l’Art. D. 136-2-2 pourront continuer leur activité jusqu’à 1er juillet 2019. Au-delà de cette date ? Ils devront avoir obtenu le certificat d’aptitude théorique…

Mais alors…

Crédit photo : Freeway Drone

L’Art. D. 136-2-2 et l’Article 2 sont en contradiction apparente. On peut supposer que les pilotes autorisés à pratiquer un scénario (S-1 à S-3) pourront continuer à le faire, sauf s’il veulent ajouter une compétence auquel cas ils devront passer le nouveau certificat d’aptitude théorique et l’attestation de suivi de formation. Mais ce n’est qu’une interprétation ! Il faudra que des éclaircissements soient apportés pour comprendre ce que signifient réellement ces deux articles.

La mention qui interroge

L’Article D. 136-2-1 indique que « la détention du certificat d’aptitude théorique de télépilote n’est pas obligatoire pour l’utilisation d’un aéronef civil circulant sans personne à bord dans le cadre d’un scénario opérationnel à moindre risque défini par arrêté du ministre chargé de l’aviation civile ». Intéressant ! Est-ce que cela signifie qu’un « scénario 0 » est toujours en prévision, par exemple pour autoriser des exploitants agricoles à réaliser des vols sans devoir être qualifiés comme pilotes ? (voir ici)

En résumé ?

Voilà un décret qui n’apprend pas grand-chose de concret, qui s’ouvre à des notions inédites dans les précédents textes comme celle d’un « scénario à moindre risque », et dont la rédaction pose beaucoup (trop) de questions…

Sources : le décret 2018-66 se trouve ici, le 2018-67 est là.

26 commentaires sur “L’examen pour les professionnels du drone en approche

  1. Ma femme et moi avons passe la partie theorique ULM (nous sommes des particuliers).

    Moi tout seul avec un bouquin en une semaine jour pour jour.
    Ma femme avec plus de preparation et gligli elle a eu la partie instructeur (moins de 5 fautes de memoire).

    C’etait franchement pas si dur avec les bonnes resources

  2. Merci Fred pour ce  » débroussaillage », car beaucoup depuis l’annonce de ce décret en avaient besoin !
    Dans le « projet » de loi qui avait été élaboré, le fait de détenir le certificat d’aptitude de télé-pilote, permettait d’accéder au S4, qui jusqu’ici, était l’apanage des détenteurs de permis PPL A ou PPL H !
    S’ils n’ont pas supprimé cette proposition, beaucoup de télé-pilotes en seront sans doute satisfait !
    ….et pour ce qui est de la « formation », ils stipulaient: « ..Un télépilote ne peut pas s’auto-former à la formation pratique basique. » Article 4 – Exigences pour les scénarios S1, S2, S3
    Wait and see !
    Et Moët-Hennessy pour certains, et vinaigre pour d’autres !

  3. C’est cool: pour les « pros » peu doués qui n’arrivent pas à vivre ni de leurs images, ni de la vente de leurs « merveilleux » drones montés sous PixHawk (voir Naza 🙂 ), ni des indemnités payés en justice par les copains qu’ils dénoncent à la BGTA, peut-être pourront-ils maintenant gagner des sous en créant des centres de formation et en ponctionnant leurs « élèves-pros » ?
    Bah c’est vrai quoi, tout le monde doit pouvoir gagner sa vie, d’une façon… ou d’une autre !
    Mathieu, déjà parti, pas taper !

  4. Ça m’étonnerait beaucoup que le S4 devienne accessible à tous les télépilotes détenteurs de la nouvelle licence. En effet, cela occasionnerait une charge de travail supplémentaire pour le contrôle aérien. La PPL ne sert à rien d’autre que de limiter le nombre de candidats, et donc d’UAV évoluant dans l’espace aérien. Il n’y a priori aucune raison que cela change.

  5. Bonjour Fred,

    merci pour ces précieuses infos !
    Peux tu préciser la notion de « compétence » stp?

    « les pilotes autorisés à pratiquer un scénario (S-1 à S-3) pourront continuer à le faire, sauf s’il veulent ajouter une compétence »

  6. Ils ne pourraient pas faire plus simple et plus clair?
    Ce n’est quand même pas rassurant, que tu sois amateur ou professionnel, que tu sois titulaire du théorique ou pas encore…
    J’ai quand même le sentiment que ceux qui sont déjà titulaires du théorique et en activité devraient être « à l’abri » de nouvelles mesures; dire à ceux-là que, hier, ils pouvaient légalement mais plus aujourd’hui alors que leur qualification et leur pratique n’ont pas changé, cela serait bizarre, non?
    En tout cas, merci beaucoup à toi, Fred, pour ce décryptage qui lève tous les voiles qui peuvent l’être. Pour les autre, ben faudra attendre…

  7. @dd
    Merci pour ton lien qui rappelle les 6 principes des règlements aviation légère en Europe, dont les fameux « droits du grand-père ». Espérons juste qu’il n’y ait pas une entorse à la règle sur la question qui nous intéresse.

  8. le S4+ ca sera pour la très longue élongation (50km), le S0 rien de sur pour le moment mais ce qui est imaginé c’est une zone de 20-30m autour du télépilote dans laquelle il pourrait évoluer librement. Il devra passer un examen simple sur le net.

  9. c’est certain que le S0 existera mais pas encore le cadre qui ira avec. J’espère avoir été plus clair 🙂 lol

  10. C’est quand même marrant de voir son pays pas capable de s’adapter a une nouvelle technologie. Un qcm ULM ne sert a rien ,juste a filtrer. mois j’attend sois disant un vrai examen drone en attendant je vol. Un qcm ulm n’a aucun intérêt par rapport a des gens qui pilote des drone depuis le début.Dans les années 90 on volait hélico et on installait déjà des caméras dessous. enfin tout ça est n’importe quoi et montre bien le gros fouttoir de nos administrations et l’incompétence dans toute sa splendeur.

  11. attention les 800gr ne sont qu’un seuil de poids maxi. C’est un décret qui fixera le poids de référence pour obliger à la formation ou non….

  12. @ Sylvain : Yes, j’ai bien précisé « pour le moment », sachant que ce seuil de masse peut être abaissé anytime…

  13. Bonjour !
    Qu’il y ai un examen théorique spécifique pour les drones, pourquoi pas ( du coup moi qui étais en train de potasser l’ULM, je ne sais pas si je laisse tomber…) par contre : « une attestation de suivi de formation délivrée par l’exploitant en charge de la formation » j’ai du mal à comprendre… j’avais compris que les différentes écoles jusqu’à présent ne délivraient pas d’attestations mais en fait nous faisaient faire (et déclarer) nous même nos MAP. et que du coup, en auto entrepreneur, on pouvait être à même de s’auto déclarer…
    il y a l’air d’y avoir un business, vraiment pas clair !
    car du coup, quelles seront les « écoles » agrées ?
    et existe-t-il un cahier des charges (exercices types) permettant de dire que telle ou telle personne est apte à faire tel ou tel scénario?
    Merci de vos éclaircissement, car je ne voudrais pas voler dans le brouillard… ^^

  14. Punaise ! Pour ceux qui viennent de passer leurs théorique c’est pas de bol !!! Et quid de la formation pratique, qui reste une sacrée somme pour ce que l’on apprend… Ne pourrait on pas avoir des exercices, au pire à faire dans des centres d’aéromodélisme (comme ça on serait en zone connue pour ce genre de pratique + encadrement) et ensuite passer un jour la pratique comme on passe le permis ?

  15. Fred, tu dit « La partie pratique sera limitée à une attestation de suivi de formation délivrée « par l’exploitant en charge de la formation ». On s’attendait à ce que la partie pratique soit… de la pratique réelle. Mais non. »
    La formation délivrée par l’exploitant en charge de la formation n’est elle pas ce que l’on nomme aujourd’hui DNC, une déclaration suite à de la pratique sur plusieurs jours (lorsque l’on suit une formation en centre bien entendu et non pas quand on se l’octroie soi même 😀 )

  16. @ Mat : Si, mais comme son nom l’indique, ce n’est qu’une déclaration. Ce qui donne lieu à des abus et à des situations où certains « pros » n’ont pour ainsi dire jamais volé.

  17. Bonsoir, mon fils, qui est bac pro photo, veut piloter un drone pour s’en servir dans son futur métier. Il est entrain de réviser pour l’examen de pilotage ULM (prévu en mars-avril). Il faut le passer ? ou bien attendre l’arrêté du mois de juin 2018 fixant les modalités du futur diplôme ? Merci pour vos réponses. Cordialement.

  18. Même question que la personne précédente. Et aussi, les instances auront elles mis en place ce nouvel exam ou bien il faudra attendre bien après Juillet ?

  19. @ Fred : oui je sais que cette DNC est utilisée n’importe comment. Ceci dit c’est tellement peu clair dans les textes que cela permet de se l’octroyer tout seul…

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