Air Tech Concept

Comment retrouver les victimes d’une avalanche au plus vite, sachant que la chance de survie de personnes est directement liée au temps qu’il faut pour les localiser et les extraire ? Il existe des solutions techniques comme par exemple le DVA (Détecteur de Victimes d’Avalanches) qui fonctionne sur le principe de signaux radio. Pour en profiter faut porter un émetteur – récepteur DVA, un appareil électronique. Ou comme le Recco, une autre technologie un peu moins contraignante pour le porteur, puisqu’elle prend la forme d’un circuit imprimé passif (et peu cher) qui peut être glissé dans des vêtements, sur un casque.

Le facilitateur ?

Que faire pour optimiser l’usage de ces deux technologies ? Utiliser un drone, évidemment ! Cette idée, Pascal Duvillier, aux commandes de la société Air Tech Concept, l’a transformé en outil opérationnel !

Helicomicro : Vous êtes pisteur secouriste 3ème degré à Morzine, dans les Alpes, donc confronté aux avalanches. Vous êtes d’ailleurs aussi artificier en mesure de déclencher des avalanches préventives. Enfin, vous êtes désormais pilote de drones. Expliquez-nous !
Pascal Duvillier : J’ai suivi une formation drone qui m’a permis d’imaginer plusieurs applications de ces appareils en montagne. La première, c’est l’usage dans le quadrillage d’un terrain d’avalanche…

HM : Le principe est d’embarquer à bord d’un drone l’équipement de détection des victimes ?
PD : Absolument ! L’appareil, en prototype pour l’instant mais totalement opérationnel, permet de porter le matériel pour la détection de balises DVA et de patches Recco. Il vole à quelques dizaines de mètres au-dessus du terrain.

HM : Quels sont les avantages par rapport à un quadrillage effectué par des secouristes ?
PD : Le terrain des avalanches est difficile d’accès. Nous sommes confrontés à des blocs de glace, des débris en tous genres. Parfois l’avalanche couvre des parties très accidentées vraiment difficiles à pratiquer à pieds. Nous, secouristes, sommes obligés de parcourir la zone de haut en bas. Le drone, lui, peut la parcourir dans n’importe quelle direction. Un autre avantage du drone, c’est qu’il est beaucoup plus rapide à quadriller la zone d’avalanche.

HM : Puisque la rapidité semble décisive pour sauver des vies, avez-vous chiffré le gain de temps ?
PD : Dans le cas d’une avalanche qui s’étend sur la superficie d’un terrain de foot, il faut 1 heure de sondages pratiqués par 100 secouristes ! Avec l’aide de la technologie Recco, il faut environ 35 minutes – le gain est significatif. Avec le drone, nous parcourons toute la zone en 8 minutes environ ! Un autre exemple : dans une zone de 2500 mètres carré de neige humide, nous avons retrouvé 3 personnes en moins de 4 minutes… Ce gain de temps permet vraiment d’augmenter les chances de retrouver des personnes en vie. Les statistiques indiquent que les chances de survie après une avalanche passent de 90 % à 25 % seulement après 15 minutes sous la neige.

HM : C’est simple, il suffisait donc d’y penser !
PD : Oui, c’est simple dans l’idée, mais la réalisation s’est révélée bien plus compliquée. Par exemple, l’électronique des outils de détection entrait en conflit avec celle du drone. Il nous a fallu isoler les problèmes et organiser le blindage des circuits. Nous avons aussi ajouté une caméra pointée vers le sol avec un retour en temps réel, ce qui permet de distinguer des indices de la présence humaine, comme un bonnet, des gants.

HM : Combien pèse l’équipement de détection ?
PD : Un peu moins d’un kilogramme, qu’il faut placer sous le drone. Nous parvenons à une autonomie, avec une batterie, d’un peu moins de 10 minutes. Parce que les conditions d’usages sont extrêmes, avec du froid qui handicape l’autonomie, nous avons choisi un fabricant de batterie spécialisé dans la tenue aux basses températures.

HM : Ce n’est pas trop difficile d’accéder sur la zone avec le multirotor ?
PD : L’appareil que nous avons choisi est pliable, il tient dans un petit volume. Les pisteurs secouristes n’ont aucun problème à emporter le matériel sur une intervention.

HM : Peut-on imaginer des vols de quadrillage sans besoin d’un pilote, programmés en quelques secondes depuis une tablette ?
PD : On pourrait ! Cela fait partie des applications auxquelles on pense. Mais ça fait beaucoup de choses à développer. En fait, les avalanches démarrent souvent dans les mêmes secteurs, mais leur ampleur est différente. La programmation à l’avance n’est pas vraiment possible. Et puis il faut aussi respecter la réglementation par rapport aux vols automatisés.

HM : Vous avez démarré une activité de secours en montagne ?
PD : Non. Après ma formation, j’ai étudié les initiatives qui concernaient les secours et les drones pour les avalanches. J’ai trouvé des projets intéressants, mais aucun n’était abouti. Parce que le secours sur les zones d’avalanches est ma principale activité, je voulais une solution réellement opérationnelle. J’ai donc créé la société Air Tech Concept en novembre 2014, avec l’aide d’un associé, pour la réalisation de drones destinés aux vols en montagne. Pas uniquement pour la détection d’avalanches, mais aussi pour la modélisation de domaines skiables, la vérification des remontées mécaniques ou encore l’aide à la conception de plans préventifs des risques d’avalanches.

HM : La formation fait-elle partie de vos activités ?
PD : Oui, la formation des pilotes aux usages spécifiques à la montagne est indispensable. Piloter un drone est une chose, mais piloter un drone dans le but de quadriller une zone de manière efficace en est une autre. Ca s’apprend ! La formation permet aussi de prendre conscience des particularités des vols en montagne. Cela passe par l’évaluation des risques liés à la météo, au relief, aux hélicoptères qui évoluent pour les secours et les activités commerciales. Les questions de réglementation sont également au programme de la formation, pour que les exploitants soient totalement en règle avec les requis en vigueur pour les professionnels.

Pour en savoir plus, direction le site web de Air Tech Concept, qui se trouve ici.

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